La
dévotion
peut diversement désigner la piété, l’attachement fervent à la
religion ou aux pratiques religieuses ou le culte particulier rendu à un
saint. En spiritualité, elle implique plutôt le service
d’amour offert à Dieu, soit l’identification à l’Éternel, au Cœur
d’infini, à l’Amour infini de la Source divine. On en trouve un bel
exemple dans la spiritualité hindoue où la Shakti vénère son
Époux, considéré comme son Maître. Mais, pour comprendre, il faut se
dégager de la notion sexiste des rôles fonctionnels, tels que l’être
humain les conçoit dans sa vision illusoire. La Shakti et
son Deva, qui apparaissent simultanément, dans la Conscience
cosmique, se savent mutuellement redevables d’amour, parce qu’égaux et
complémentaires, mais incomplets en eux-mêmes, considérés
uniquement dans leur fonction, ils restent seuls, mais parfaitement
compatibles. Ainsi, si l’un devait disparaître, l’autre devrait
simultanément disparaître aussi.
Dans ce contexte, la dévotion
consiste à se vouer corps et âme à une cause parce qu’on sait que c’est
de son intérêt de le faire. Alors, l’être y met tout son cœur,
tout son corps, tous ses biens, toute son âme, tout son esprit,
toutes ses énergies, bref, tout son être. L’Absolu, appelé Dieu par
commune entente, qui est impassible, n’oblige pas à la
dévotion. C’est l’être humain qui se l’impose, dans son libre
arbitre, pour entrer dans l’Ordre de la Grâce et de la Béatitude, parce
qu’il sait que c’est le seul moyen d’échapper à l’enfermement
e à ses limites apparentes. Il cherche à se confirmer les propos de
Jésus, quand il a dit : «Préoccupe toi, en premier, du Royaume, et tout
le reste te sera donné de surcroît…» En fait, la
dévotion envers Dieu permet simplement d’engendrer le lien
énergétique qui peut nourrir l’âme et l’amener à fusionner avec lui,
pour se découvrir semblable à lui. Elle commence par la centration,
en lien avec son Centre intime, sur l’expérience la plus pertinente à
vivre dans le moment.
La dévotion représente la recherche
déterminée de la Conscience cosmique (ou Réalisation). La spiritualité,
qui représente une vie accordée de l’Esprit, de l’âme et
du corps, permet à l’être humain de manifester dans sa plénitude la
Divine conscience cosmique présente tant à l’intérieur qu’à l’extérieur
de lui. Ceci consiste à abattre les barrières entre
Dieu et la Nature et établir leur unité essentielle et éternelle.
Elle permet de réaliser l’état de Conscience divine, car elle consiste à
éveiller la connaissance de l’Absolu en soi en
développant une indifférence au monde phénoménal, aux événements
extérieurs, aux mondanités, aux jouissances terrestres, sauf pour ce qui
concerne sa subsistance, ses besoins fondamentaux, sa
santé et son bien-être. Elle s’établit sur la certitude que Dieu est
le fondement de l’Univers et qu’il n’est qu’Amour, Lumière et Bonté.
Ainsi, l’être incarné qui aspire à se
réaliser en une seule vie gagne à s’efforcer de percevoir la Présence
divine dans chaque particule, à chaque instant, à
reconnaître que seul un esprit pur et désintéressé peut
l’accueillir, d’où il remplit son mental de pensées amoureuses, pures,
sacrées, divines. La dévotion représente un état intérieur de
simplicité, de transparence, d’humilité et de confiance enfantine
qui implique tout son être, mis au service de la glorification divine,
pour éviter de se tenter de se concentrer sur l’Absolu à
partir d’un mental fragmenté, car, pour parvenir à la Libération, le
mental doit être dirigé exclusivement vers le Créateur, la Voie droite,
directe et aisée du Salut. Ainsi, la dévotion implique
l’amour de soi, l’amour de toute créature en tant que manifestation
de Dieu et l’amour de Dieu.
Selon le niveau de conscience du
sujet auquel elle s’adresse, la dévotion sincère lie à l’énergie
spirituelle, voire à l’Énergie divine elle-même, permettant, par
assomption, d’établir avec elle une alliance afin d’engendre
ultimement une fusion subtile. Elle implique le respect et la vénération
pour Dieu ou pour ce qui est supérieur à soi. Elle évoque son
propre idéalisme et fait aspirer à ressembler à celui qui est
honoré.
La plus grande démonstration de
dévotion consiste à accomplir son devoir d’état ou à réaliser son plan
de vie dans le service amoureux de Dieu, de sa planète
d’accueil et de ses semblables. Elle implique qu’un sujet révère et
savoure constamment la Perfection suprême de Dieu. La véritable dévotion
élève au-delà des dogmes religieux, des croyances
personnelles, des règles d’action et des buts individuels. Elle
amène en quelque sorte à entrer en possession de son Essence, la Source
de toute félicité, élevant dans l’omniscience,
l’omniagence, l’omnipotence, l’omniprésence et la perfection de la
Totalité. Peu à peu, un sujet apprend à aimer Dieu parfaitement, de
façon toute naturelle, sans pudibonderie, se découvrant son
bien-aimé, y trouvant toute sa félicité.
Hélas, pour la majorité des
pratiquants, la dévotion consiste en une marque infantile
d’asservissement à une force qui leur est extérieure ou en l’aveu d’une
dépendance aveugle qui empêche l’âme d’exprimer sa maturité. Elle
donne alors une image déformée du Divin à laquelle l’être qui manque de
maturité s’accroche désespérément. La vraie dévotion
consiste en une fusion du corps et de l’âme. Elle doit éviter de
s’afficher de façon ostensible, tel un étendard de spiritualité, pour
mieux attirer l’attention céleste ou les regards d’autrui ou
de s’exprimer tel un marchandage incessant que la conscience humaine
mène avec la Divinité. Une telle forme de dévotion constitue la
signature, si commune et étouffante, de la fausse humilité,
mère des simagrées, subtile prétention de ces bien-pensants qui
affichent leur connaissance présumée de l’attitude juste.La vraie
dévotion amène à consacrer toutes ses énergies à se
réaliser dans le silence et le
secret. S’élevant au-delà de la spéculation mentale, la dévotion naît de
la spontanéité du cœur, avec conventions et rituels ou sans
conventions ni rituels, se fichant de l’opinion des autres. Elle
résulte d’une harmonisation progressive, mais naturelle et évidente, de
l’âme individuelle avec l’âme d’un lieu ou d’un être
supérieur. Fruit de l’amour pur et total, elle se manifeste sans
réflexion ni étalage, portant l’être au summum de ses possibilités. Elle
n’est ni infantile, ni calculatrice, ni malicieuse,
puisqu’elle jaillit de l’humilité, cette vertu qui amène à se voir
dans sa vérité, avec ses grandeurs et ses faiblesses apparentes. Elle
jaillit sans entrave de la liberté personnelle,
n’impliquant jamais la soumission ou l’annihilation de la conscience
individuelle au profit d’une réalité qui la dépasse. Mais elle fournit
une clé pour redresser et remémorer son droit légitime
d’entrer en possession de son héritage plénier de biens et bienfaits
et d’accéder au Royaume de Dieu. Elle aide à marcher seul et fier, même
parmi les autres, pour fusionner avec la Véritable
Splendeur de l’Absolu.
Le meilleur moyen d’exprimer sa
dévotion envers l’Absolu, c’est de se laisser pénétrer et transformer
par son Essence, qui est Amour pur, Source de Vie. Seul
l’Amour vrai amène à vibrer à un rythme plus élevé, la condition
unique pour accéder aux royaumes supérieurs. En nos temps, il n’est plus
nécessaire d’étudier, de se soumettre à divers rituels,
d’appliquer la moindre technique, pour s’accomplir dans l’Absolu, il
n’est plus d’autre besoin que de vibrer cette Énergie primordiale à
plein cintre, dans le silence et le secret, pleinement
centré sur le moment présent. La dévotion revient à vivre la vraie
vie, c’est-à-dire à s’impliquer dans ce qui est à vivre à chaque instant
de la meilleure manière qu’un être le peut, assuré
qu’il y trouvera matière à augmenter sa sagesse et à mieux approcher
sa Réalité d’Être. Ainsi, il n’y a rien de compliqué, de sévère, de
compassé ni d’exigent dans la dévotion, il n’y a que la
pertinence et la cohérence du vécu quotidien dans l’Amour pur et la
joie sereine.
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